Mobilité électrique : le point sur le maillage français

Le réseau de production d’électricité français pourrait-il arriver à saturation en cas d’adoption massive de la mobilité électrique ? Le développement du maillage des bornes de recharge sera-t-il à la hauteur de nos besoins futurs ? Décryptage avec Christophe Sébastien, Responsable Développement Durable, Ancrage Territorial Local & Mobilité Électrique pour EDF Division Production Nucléaire.

Si l’on s’en réfère au dernier Baromètre publié par l’Avere-France (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique), on dénombrait sur le territoire hexagonal 29 578 points de recharge ouverts au public. Avec un maillage en constante densification (+15% en un an), le rythme est soutenu. Mais suffira-t-il pour atteindre l’objectif de 100 000 points de recharges promis par le gouvernement à l’horizon 2022 ? Rien n’est moins sûr. Derrière les résultats globaux, d’autres indicateurs soulèvent des interrogations. Ainsi, la part de bornes déployées en voirie ou sur les sites publics, a reculé de 7% entre mars 2019 et mars 2020. « L’abandon du réseau de bornes de recharge des Autolibs explique en partie ce recul, observe Christophe Sébastien, Responsable Développement Durable, Ancrage Territorial Local & Mobilité Électrique pour EDF, mais il serait facile de remettre ces bornes en service ».

Densification du réseau, des enjeux de perception

Si l’on dénombre en France près d’un milliard de prises électriques domestiques pouvant être utilisées pour la recharge des véhicules, la densification du maillage des points de recharge demeure un enjeu d’actualité. Pour y répondre, encore faut-il une vraie volonté et un plan d’action concret de l’ensemble de l’écosystème (pouvoirs publics, énergéticiens, constructeurs) , « mais c’est aussi dans la compréhension de l’usage réel de la mobilité électrique que se situe le défi.” En effet, le véhicule électrique est encore perçu comme une solution de mobilité résolument urbaine.

Celui-ci n’est pas réservé à un usage citadin contrairement aux apparences. C’est pourquoi la cartographie des points de recharge doit être repensée vers les zones péri-urbaines et pas seulement dans les centres-villes », analyse Christophe Sébastien.

Tandis que l’on estime à 240 000 le nombre de véhicules électriques en circulation sur le territoire français, centres urbains et périphéries confondues, certains s’inquiètent encore de la capacité de réponse du réseau français dans le cas d’une adoption massive de la motorisation électrique. Mais in fine en France, ce n’est pas tant la capacité de production électrique qui serait à mettre en cause, car elle resterait largement suffisante pour les besoins courants même en cas d’une augmentation significative, mais véritablement le stockage de cette production.

Faire de chaque véhicule électrique, une source d’énergie…

« La difficulté, c’est de “conserver” la production électrique. C’est là que les véhicules électriques peuvent être considérés comme une réponse à l’enjeu ». En effet, pour Christophe Sébastien, il s’agit de considérer chaque voiture électrique « comme une batterie sur roulette » capable de restituer sur le réseau, une partie de sa charge lorsque des pics de consommation sont enregistrés.

« Le flux électrique sur le réseau national est bidirectionnel, explique Christophe Sébastien. En optant pour une stratégie vehicule-to-grid, EDF pourrait racheter aux propriétaires de véhicules électriques, une partie de l’énergie disponible dans leurs batteries lorsque le véhicule est inutilisé ».

Lorsque l’on sait qu’une automobile ne passe que 5% de sa durée de vie sur les routes, on mesure alors pleinement le potentiel pour le réseau électrique. « Si l’on considère qu’un véhicule électrique parcourt en moyenne 15 000 km par an, à 15 kW/h pour 100 km, 3 millions de véhicules représenteraient 1% de la production électrique en France. Il existe bien des questionnements légitimes sur la mobilité électrique depuis l’évolution des usages, en passant par l’abandon de l’héritage culturel de 150 ans de mobilité thermique, mais la capacité de production d’énergie en France n’en fait pas partie » conclut Christophe Sébastien.