Gestionnaires de flotte : ce qu’ils pensent de leur métier

Confrontés à des enjeux toujours plus structurants tant pour leur entreprise que pour la société tout entière, les gestionnaires de flotte remplissent des missions de plus en plus diversifiées. Savoir-faire technique, comptable, informatique, capacité à réconcilier temps court et temps long… Deux gestionnaires de flotte partagent leur vision de leur métier. Retour sur une profession en constante réinvention ! 

Nos témoins …

  • Véronique Huber a la responsabilité de la flotte de Caudalie. Créée en 1995, cette entreprise française de cosmétiques est spécialisée dans la vinothérapie. La flotte est constituée de 118 véhicules en France et 160 en Europe. Trois profils d’utilisateurs sont clairement identifiés : les commerciaux, les managers et les membres du Comex. 
  • Eric Diallo est directeur administratif et financier et gère la flotte des Laboratoires Majorelle. Cet acteur pharmaceutique français a fondé sa démarche sur un positionnement citoyen, proche des patients en proposant des traitements accessibles. Avec une flotte d’une cinquantaine de véhicules, l’entreprise équipe ses visiteurs médicaux et ses visiteurs “pharmacie” qui parcourent en moyenne 15 000 km par an en zone urbaine et 60 000 km par an en zone rurale

Quelle vision avez-vous de la mission des gestionnaires de flotte ?

VH : Notre fonction exige beaucoup de rigueur et d’organisation et, je pense que pour être à la hauteur de la mission, il faut vraiment être animé du sens du service. Nous devons garantir des conditions optimales de mobilité pour les collaborateurs, lesquelles sont indispensables aux bonnes performances de l’entreprise. Le gestionnaire de flotte réalise un grand écart permanent entre des arbitrages économiques, l’efficacité des équipes de terrain, et l’impact environnemental de la mobilité. La tâche est complexe, elle nécessite beaucoup d’engagement mais elle est aussi gratifiante. 

ED : Je remplis cette mission en complément de mes responsabilités de DAF et de supply chain. J’aime m’impliquer pour proposer à nos collaborateurs des véhicules qui leur permettent de travailler dans les meilleures conditions. Les choix que nous effectuons en matière de mobilité en disent beaucoup sur notre entreprise, ses valeurs, sa proximité avec ses équipes comme ses clients. La mission du gestionnaire de flotte est exigeante et nécessite de prendre souvent beaucoup de recul. 

Parmi les nombreux défis du quotidien, quels sont ceux qui semblent les plus ambitieux ?

VH : La fonction de gestionnaire de flotte est transverse. Mais sa complexité est souvent méconnue au sein de l’entreprise. Par exemple, nous ne pouvons pas nous inscrire dans une démarche de censeur vis-à-vis des collaborateurs même si nous sommes en partie garants de leurs comportements en matière de mobilité. Nous faisons également des choix qui ont des conséquences économiques non négligeables, et pourtant il n’existe pas de formation spécifique à la fonction de gestionnaire de flotte. S’adapter sans cesse, se remettre en cause, être curieux et savoir assurer une veille constante, ne jamais relâcher l’attention me semble être le volet le plus ambitieux de la fonction de gestionnaire de flotte.

ED : Nous sommes au cœur de différents enjeux très importants, mais le plus difficile c’est sans doute les constants changements sur le plan normatif ou encore fiscal qui rendent l’équation très complexe car les choix opérés à l’instant T auront des conséquences à long terme. La capacité à avoir une vision, à se projeter dans un contexte souvent remis en question, m’apparaît comme le défi le plus ambitieux.

Comment vous positionnez-vous par rapport à l’enjeu de verdissement des flottes ?

VH : Caudalie est déjà engagée dans ce processus. Le respect de l’environnement est au cœur de nos valeurs et même si pour certains de nos commerciaux, il n’est pas encore possible de renoncer au diesel, nous avons intégré des motorisations hybride et électrique dans notre car policy. Nous avons déjà mis à la route deux KONA électriques, deux hybrides et un hybride rechargeable. A l’horizon 2023, environ 20% de notre flotte sera en électrique ou hybride rechargeable.

ED : Chacun est favorable au verdissement des flottes. Mais il faut se méfier des décisions à l’emporte-pièce. Il y a encore de nombreux cas de figure où les motorisations thermiques sont indispensables. Je ne crois pas au modèle full électrique, sauf pour les équipes qui circulent dans des aires ultra-urbanisées. Nous disposons déjà de deux Tucson hybrides légères 48V. En 2021, nous devrions également intégrer des KONA hybrides au sein de notre flotte, mais le calendrier est un peu bouleversé suite à la COVID-19. 

Hybride, hybride rechargeable, électrique, comment travaillez-vous à intégrer ces nouvelles motorisations ?

VH : Je procède à une veille constante sur les nouveaux modèles. Nous avons également à cœur de rassurer les collaborateurs, de faire acte de pédagogie pour lever les freins, les réticences à l’adoption des nouvelles motorisations. Globalement, les véhicules électriques et hybrides sont très appréciés une fois que les utilisateurs ont pu les essayer et en mesurer les bénéfices. Mais, il faut aussi s’approprier de nouveaux réflexes et cela nécessite de s’impliquer à leurs côtés.

ED : Nous les accueillons très favorablement. Je suis pour ma part très ouvert à l’hydrogène qui m’apparaît comme une solution très pertinente puisqu’elle abolit la difficulté des temps de recharge. Mais il faut encore que la filière se structure et qu’un véritable réseau de stations se développe. Je suis également toujours vigilant à la façon dont un constructeur va se mobiliser pour nous accompagner. Derrière l’enjeu environnemental, il y a aussi les réalités de tous les jours. C’est pourquoi je reste très attentif à la fiabilité des véhicules autant qu’au réseau des marques. Je pense que le gestionnaire de flotte doit oser sortir des sentiers battus et, pour remplir correctement sa mission, tester ce que l’on appelle les marques alternatives, qui ont souvent une attitude très positive.

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